La marche était difficile, pieds nus. Comment était-elle arrivée là, elle n'en avait aucune idée. Simplement, un soir, elle s'était comme réveillée d'un long sommeil. Si long qu'il semblait même qu'elle n'avait jamais vécue avant. Pourtant, des bribes de souvenirs lui remontaient à la conscience. Son nom, pour commencer : Emiade. La forêt aussi. Elle lui semblait familière. Pourtant quelque chose avait changé. L'abbaye, dressée là, ne lui inspirait rien. Un tas de pierres. Les loups. Les kobolds aussi. Eux, ils avaient changé. Ils ne l'attaquèrent pas quand elle s'approcha d’un de leurs campements rudimentaires. Ils la laissèrent même s'installer près d'un feu pour se réchauffer. C'était idiot d'ailleurs car il ne faisait pas froid. Mais cela soulagea un peu la douleur de ses pieds. Pourquoi avait-elle mal à ses pieds ? Elle les regarda dans la pénombre. Elle sentit comme quelque chose d'humide. Elle passa sa main droite sous la plante de l'un deux et la ramena vers son visage pour voir ce que c'était. Ses doigts étaient tâchés de rouge. Du sang. Sans doute le sien. Ses pieds étaient meurtris comme si elle avait longuement marché dans de la pierraille. Elle allongea les jambes, essuya sa main dans l'herbe, se délassa un instant. Un kobold la regardait.
"Toi pas prendre bougie ?"
Emiade ne sut pas pourquoi, mais cette question l'agaça.
"Qu'est-ce que j'en ai à foutre de ta bougie ?" lui répondit-elle sèchement.
"Toi pas prendre bougie. Bougie à moi. Toi pas prendre" reprit-il.
Elle sentit le sang bouillir dans ses veines. Une irrésistible envie de faire taire cette créature laide et stupide l'envahit. La douleur de ses pieds s'effaça et une étrange force la fit bondir sur le kobold qui se prit un déluge de coups de poings et de pieds partout sur le corps. Il n'eut guère le temps de comprendre ce qu'il lui arrivait. Il tenta toutefois de se défendre mais les rares coups qu'il parvint à donner à la jeune humaine ne semblaient rien lui faire. Bientôt, le kobold s'écroula parterre, inanimé. De rage, elle continua de frapper en grognant. Cela ne servait plus à rien, il était évident qu'il avait succombé à la hargne de son agresseur depuis déjà un moment. Pour bien sceller l'affaire, elle alla ramasser la fameuse bougie qui avait roulé à un mètre du corps. Elle lui enfourna ensuite dans la bouche avec une violence inouïe jusqu'à la faire totalement disparaître.
"La voilà ta bougie, crétin. Personne ira la chercher là-dedans... Enfin, je suppose."
Un autre kobold, attiré par le bruit mais arrivé un peu trop tard pour sauver son camarade, fut la victime suivante. La rage de la fille ne s'était pas calmée et quand elle l'entendit brailler qu'il ne fallait pas lui prendre sa bougie, elle le massacra. Ses mains étaient rouges du sang de sa victime. Ses yeux brillaient de hargne. Sa bouche vomissait des insultes. D'autres kobolds tentèrent de s'approcher mais ils crurent qu'un horrible monstre s'en prenait à leurs campements et ils s'enfuirent dans la mine.
Au petit matin, Emiade gisait dans l'herbe des collines au nord de l'Abbaye. Elle était sale. L'odeur du sang persistait sur elle comme l'odeur de la charogne hante les champs de bataille longtemps après en avoir enterré les morts. Elle se dressa lourdement sur ses genoux, regarda ses mains pleines de sang séché, et se leva pour se rendre à la rivière en évitant de se faire voir par les gens de l'abbaye. Sur la rive, à l'abri des regards, elle ôta les guenilles qui lui servaient de robe et pénétra dans l'eau fraîche. Elle nagea ainsi un moment, se débarrassa des souillures de la veille sur son corps avant de ressortir pour nettoyer la robe crasseuse. Mais la saleté s'agrippait et, malgré ses efforts, elle ne parvint pas à tout enlever.
"Peu importe. Je trouverai bien autre chose à me mettre sur la route".
Elle remit ses loques et partit.
"Toi pas prendre bougie ?"
Emiade ne sut pas pourquoi, mais cette question l'agaça.
"Qu'est-ce que j'en ai à foutre de ta bougie ?" lui répondit-elle sèchement.
"Toi pas prendre bougie. Bougie à moi. Toi pas prendre" reprit-il.
Elle sentit le sang bouillir dans ses veines. Une irrésistible envie de faire taire cette créature laide et stupide l'envahit. La douleur de ses pieds s'effaça et une étrange force la fit bondir sur le kobold qui se prit un déluge de coups de poings et de pieds partout sur le corps. Il n'eut guère le temps de comprendre ce qu'il lui arrivait. Il tenta toutefois de se défendre mais les rares coups qu'il parvint à donner à la jeune humaine ne semblaient rien lui faire. Bientôt, le kobold s'écroula parterre, inanimé. De rage, elle continua de frapper en grognant. Cela ne servait plus à rien, il était évident qu'il avait succombé à la hargne de son agresseur depuis déjà un moment. Pour bien sceller l'affaire, elle alla ramasser la fameuse bougie qui avait roulé à un mètre du corps. Elle lui enfourna ensuite dans la bouche avec une violence inouïe jusqu'à la faire totalement disparaître.
"La voilà ta bougie, crétin. Personne ira la chercher là-dedans... Enfin, je suppose."
Un autre kobold, attiré par le bruit mais arrivé un peu trop tard pour sauver son camarade, fut la victime suivante. La rage de la fille ne s'était pas calmée et quand elle l'entendit brailler qu'il ne fallait pas lui prendre sa bougie, elle le massacra. Ses mains étaient rouges du sang de sa victime. Ses yeux brillaient de hargne. Sa bouche vomissait des insultes. D'autres kobolds tentèrent de s'approcher mais ils crurent qu'un horrible monstre s'en prenait à leurs campements et ils s'enfuirent dans la mine.
Au petit matin, Emiade gisait dans l'herbe des collines au nord de l'Abbaye. Elle était sale. L'odeur du sang persistait sur elle comme l'odeur de la charogne hante les champs de bataille longtemps après en avoir enterré les morts. Elle se dressa lourdement sur ses genoux, regarda ses mains pleines de sang séché, et se leva pour se rendre à la rivière en évitant de se faire voir par les gens de l'abbaye. Sur la rive, à l'abri des regards, elle ôta les guenilles qui lui servaient de robe et pénétra dans l'eau fraîche. Elle nagea ainsi un moment, se débarrassa des souillures de la veille sur son corps avant de ressortir pour nettoyer la robe crasseuse. Mais la saleté s'agrippait et, malgré ses efforts, elle ne parvint pas à tout enlever.
"Peu importe. Je trouverai bien autre chose à me mettre sur la route".
Elle remit ses loques et partit.